« S’il faut vraiment définir l’autorité, alors ce doit être en l’opposant à la fois à la contrainte par force et à la persuasion par arguments. La relation autoritaire entre celui qui commande et celui qui obéit ne repose ni sur une raison commune, ni sur le pouvoir de celui qui commande ; ce qu’ils ont en commun, c’est la hiérarchie elle-même, dont chacun reconnaît la justesse et la légitimité et où tous deux ont d’avance leur place fixée ». Hannah Arendt. La crise de la culture, « Qu’est-ce que l’autorité ? »

Du latin « auctoritas »
« Auctoritas » naît du verbe « augere ». Augmenter. Ceux qui dirigent voient leur autorité augmentée puisqu’elle tient sa force de l’Empire Romain. Il y a donc dans l’origine d’autorité cette capacité à faire grandir. D’ailleurs le verbe « augere » a aussi donné « auteur ». L’auteur au sens premier est celui qui est à l’origine de quelque chose.

L’autorité implique donc le fait d’avoir une légitimité. Une légitimité pour pouvoir donner des ordres. Autorité paternelle et maternelle, autorité de la chose jugée. Autorité et pouvoir sont proches mais une autorité autorise, et un pouvoir peut. Bien entendu si l’on abuse de son autorité, on est en marche vers l’autoritarisme et l’abus.

Si autorité est un mot qui occupe régulièrement l’actualité, c’est entre autres par le biais des nombreux organismes de régulation : l’Autorité européenne de sécurité des aliments, l’Autorité de la concurrence, l’Autorité de sûreté nucléaire…A l’heure des incivilités et d’une montée vers les formes les plus diverses de violence, autorité est un mot re évoqué et tiré à hue et à dia !

Autorité en crise
On ne cesse de dire, dans un monde fracturé et chaotique, que l’autorité est en crise. Michel Serres, lui, relativisait. Selon lui, il y a quelques années encore, nous assistions à l’arrivée d’une nouvelle notion dans l’autorité, s’installait « l’autorité de compétence », cette autorité de compétence a la faculté d’augmenter le savoir de son prochain. Il ne s’agit plus de l’autorité de celui qui sait face à tous ceux qui ne savent rien.

Autorité et consentement
Finalement, comme l’écrit Maurice Thévenet dans « Managers en quête d’auteur » aux éditions Les Belles Lettres, le manager devra toujours assumer ce qui caractérise tous les échelons de responsabilité : « une capacité de décision en dernière instance » et « une autorité de contrôle ».

Même s’il n’en a pas envie, le manager est celui qui tranche. En anglais décider, c’est couper court : « cut it short ». Chaque jour, pour faire avancer ses collaborateurs et les motiver, il ou elle sait que son seul rôle de dirigeant ne suffit pas à lui procurer une autorité acceptée par tous.

Dans les ouvrages de management, avec justesse d’ailleurs, on distingue le manager et le leader. Le manager est légitime parce que l’organisation de l’entreprise a décidé de lui conférer une position de force. Toutefois plus que jamais, il doit aussi transmettre et partager

Le leader, lui, se place sur un autre terrain. Il incarne une vision. Il est l’auteur qui inspire le projet d’entreprise. Il n’est pas forcément celui qui agit au quotidien. Pourtant, tous deux possèdent de l’autorité.

A l’heure de Wikipedia et du savoir digital disponible en flux constant, le dirigeant « n’est plus celui qui sait tout sur tout ». « L’autorité provient désormais du « savoir être » de la personnalité, du charisme, de la capacité de faire adhérer des hommes à des idées, et surtout de la capacité à les faire travailler ensemble » a écrit Bernard Ramanatsoa ex-Directeur Général d’HEC dans la Paris Tech Review. Toutes les dimensions qui fondent l’autorité sont en train de s’élargir. Et plus que jamais l’autoritarisme arbitraire est contesté. L’autorité est, elle, tolérée si elle est ressentie comme légitime.

Attention, l’autorité n’est plus là pour vous introniser à jamais dans un rôle. Elle n’est plus un outil pour se maintenir au pouvoir. Et tant mieux. Elle est accordée au manager qui sait faciliter, partager, conforter et accompagner ses équipes à la victoire ! Comme la confiance, désormais, elle ne se décrète pas ou plus, on doit la mériter !

Jeanne Bordeau
bordeau@madamelangage.com

Jeanne Bordeau #MadameLangage, août 2020

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